Journée d'échanges de Réseau Carel à la Bibliothèque La Part-Dieu, à Lyon, le 5 décembre 2023. 

Ouverture de la journée d'échanges

  • Nicolas Galaud, Directeur de la Bibliothèque municipale de Lyon
  • Alexandre Lemaire, Président de Réseau Carel
  • Jean-Yves de Lépinay, Président d’Images en bibliothèques

Le support DVD est loin d’être mort. Exemple à la bibliothèque de Lyon : 850 000 DVD prêtés sur un total de 4 millions de prêts. Baisse de 11% par rapport à l’avant-Covid toutefois, alors que les prêts de livres ont augmenté par rapport à 2019 (mais la fréquentation n’a pas retrouvé son niveau d’avant). La bibliothèque de Lyon propose de la VOD depuis 2023.

Cette journée sur la VOD organisée par CAREL complète celle de l’an dernier sur le DVD (“DVD en bibliothèque : quel avenir pour les collections de films ?” - Voir le replay).

Enjeux et tendances du marché de la VOD

Intervention de Louis Wiart, Professeur en communication, Université libre de Bruxelles.

Basculement des pratiques de consommation vers le streaming

Depuis les années 2010, recul de la télé qui concerne toutes les générations. La consommation de VOD augmente tandis que la durée passée devant la télévision diminue, et la tendance s’accélère (30 minutes de moins par jour). Une partie de l’audience a basculé vers le numérique. 

 

Plusieurs types de VOD

  • SVOD : vidéo à la demande sur abonnement. Exemple : Netflix
  • TVOD : transactionnelle (quand on achète)
  • AVOD : advertisement. Est financée par la pub

Ces dernières années, les études montrent une explosion de la “consommation” de la SVOD, TVOD, AVOD : les bénéfices de ces ressources ont triplé entre 2010 et 2020. Le nombre d’abonnés croît de 30 à 40 % par an.
En Europe, il existe plus de 400 plateformes de VOD, mais le marché est concentré autour de quelques acteurs avec des offres généralistes (Netflix, Amazon, Apple, Disney).
En France, Netflix et Amazon ont à eux seuls près de 70 % des abonnés. Si on y ajoute Apple, ça fait 90 %. Les autres plateformes sont sur des niches spécialisées.

 

Stratégies

  • Se constituer une base d’abonnés, ce qui implique un effort de promotion maintenu dans le temps en raison du turn-over des usagers (aux USA, il y a 5 à 6 % de “churn” = gens qui se désabonnent). C’est comme un seau percé qu’il faut continuer en permanence à remplir pour qu’il ne se vide pas. Dans un contexte de concurrence renforcée, le désabonnement est le pire ennemi des plateformes. D’où des dépenses marketing très importantes. Le “coût d’acquisition” d’un abonné augmente de plus en plus : 92 $ en 2018 pour Netflix, 140 $ désormais.
    L’objectif est donc simple : conquérir et fidéliser pour croître.

  • Cette concurrence renforcée a généré de nouvelles formules commerciales : abonnement moins cher mais avec de la pub.

  • Amazon (Prime vidéo) et AppleTV se positionnent dans la VOD pour augmenter leur offre globale
    Pour Apple, la VOD est un moyen de valoriser ses appareils, dont la vente assure l’essentiel des marges. Les études ont d’ailleurs démontré que dans les films et séries produits par Apple, c’est toujours le héros ou des personnages positifs qui utilisent des produits de la marque.
    Amazon (qui a racheté les studios MGM) veut attirer les clients vers la formule d’abonnement Prime, afin de les inciter à faire d’autres achats sur Amazon, pour rentabiliser l’abonnement. Jeff Bezos : “Lorsque nous remportons un Golden Globe, cela nous aide à vendre plus de chaussures”.

  • Netflix est devenu producteur de contenus (car les studios et les acteurs récupéraient leurs droits pour lancer leurs propres plateformes). Cela donne une identité à la plateforme, lui permet de se singulariser.

  • Disney a une stratégie transmédiatique qui consiste à décliner sur plusieurs supports des éléments d’un même univers narratif. Cela lui permet de réduire les risques économiques liés à la production des films et d’en maximiser l’exploitation sur le temps long (exemple de la Reine des Neiges dont on entend toujours parler et dont les produits dérivés se vendent toujours autant 15 ans après la sortie du premier film).
    Ils font donc l’acquisition d’univers narratifs : rachat de Pixar, Marvel, Lucasfilm, Fox, National Geographic, les Simpson, etc. Sous l’influence de Netflix, Disney a lancé plusieurs plateformes, dont Disney+. Un tiers du chiffre d’affaires est généré par le streaming, même si la plateforme en elle-même n’est toujours pas rentable.


De la globalisation à la glocalisation 

Globalisation centrée sur les USA : le marché est dominé par des plateformes américaines avec du contenu anglo-saxon (il y a 50 % d’oeuvres américaines dans le catalogue proposé en Europe), permettant la mise en visibilité des produits américains de grande consommation : le “placement de produit” (ceux d’Apple notamment) dans les programmes.

Glocalisation : Les plateformes proposent de plus en plus de contenu européen, pour s’adresser au spectateur et pour se plier aux contraintes réglementaires. Cela bouleverse la cartographie européenne car l’Espagne et l’Angleterre attirent le plus d’investisseurs en raison de leur potentiel d’exportation (vers l’Amérique du Sud pour les telenovelas, etc.), et cela entraîne un risque de folklorisation (ex : Emily in Paris) et d’uniformisation des contenus (Netflix investit dans les productions sud-coréennes car il y a une popularité internationale d’autres éléments sud-coréens : Kpop par exemple).

 

Inquiétudes 

Qu’en est-il de la découvrabilité, qui est la capacité pour des œuvres différentes d’être mises en avant et portées à l’attention du public ?

On sait qu’en musique, 1 % des artistes concentrent 99 % des écoutes. La mise à disposition d’une offre abondante n’est pas suffisante pour assurer la diversité culturelle, il faut aussi que les œuvres puissent être repérées.

D’où un nouvel objectif de politique publique : avant, on essayait de créer des plateformes européennes, mais le marché était déjà pris par les américains. Maintenant, la réglementation européenne impose aux plateformes des quotas de production européenne et des obligations de mise en visibilité des œuvres.

Cependant, il y a aussi un travail à faire du côté des petites plateformes qui ont pour objectif de promouvoir des cinéma spécifiques (patrimonial, d’auteurs, documentaire, jeunesse…) : leur apporter un soutien renforcé, notamment par une collaboration avec le milieu des bibliothèques.

 

Temps de questions-réponses

  • Question : “Et les Chinois ?”

    Réponse : Ils ont leurs propres plateformes, mais s’implantent plutôt dans l’Asie du Sud-Est et l’Afrique. Leurs plateformes sont pensées pour la nouvelle classe moyenne chinoise et ne correspondent pas au public européen ou américain. Le contexte politique joue également : les Américains ont pris des sanctions contre Huawei (interdiction d’acheter des composants américains) et mis en place une réglementation visant TikTok. Quant au gouvernement chinois, il a repris le contrôle de certaines plateformes qui commençaient à devenir trop critiques (disparition du patron d’Alibaba pendant plusieurs semaines).
    Netflix est rentable depuis peu (et très endetté). Disney+ n’est pas rentable, ils appliquent juste une logique de contrôle des coûts. Amazon et Apple sont rentables dans l’ensemble mais on n’a pas le détail. On a donc une domination par des acteurs économiques qui sont extérieurs au secteur culturel. Cela leur permet de faire des offres à prix cassé pour asseoir une domination, puis d’augmenter les tarifs.

  • Question : "Quels sont les impacts directs de la VOD sur la création ?"

    Réponse : Une plateforme plus petite peut produire du contenu qui n’aurait pas trouvé sa place sur une chaîne de télévision.
    D’autres créateurs disent qu’on leur impose des manières de faire. Par exemple, les productions Netflix sur le territoire indien doivent répondre à un cahier des charges qui ne correspond pas aux manières de faire là-bas. Cela vient aussi de la différence de responsabilité entre les statuts locaux et ceux de l’industrie américaine : “production déléguée” / “production exécutive”.

  • Question : "Rôle des moteurs de recommandation ? Il faudrait peut-être revoir leur fonctionnement, ou l’inverser (“vous n’avez jamais vu…”)"

    Réponse : Un moteur de recommandations ne peut prendre en compte que ce sur quoi il a des données, donc c’est forcément biaisé. Sans ces données, il ferait remonter n’importe quoi et les gens seraient déstabilisés. Il faut réussir à jongler entre ne pas déstabiliser l’usager et faire découvrir des choses. Certes on peut explorer soi-même un catalogue, mais à condition qu’il ne soit pas trop large. Travail en cours sur un algorithme éthique : "je vous propose ceci et voici pourquoi je vous le propose".

  • Question : "Des exemples d’AVOD ?"

    Réponse : l'AVOD c'est de la VOD avec de la pub, peut être gratuit ou payant. Youtube, les replays de télés, l’abonnement low-cost Netflix… sont des AVOD.

L’offre VOD pour les bibliothèques et focale sur club utilisateurs VOD de Réseau Carel

Intervention d'Emmanuelle Suné, négociatrice Réseau Carel, Bpi, et Franck Queyraud, Vice-Président de Réseau Carel.

Un point sur les offres référencées par Réseau Carel avec deux précisions : MediciTV et la Philharmonie de Paris ont été exclus car il s’agit plutôt de contenu musical.
CVS et la Médiathèque numérique Arte sont les deux offres prédominantes en bibliothèque, avec un modèle tarifaire comparable.

 

Médiathèque numérique Arte :

  • Plateforme d’agrégation de contenu (catalogue de VOD Arte + UniversCiné + la Cinétek) avec une offre de cinéma, séries, documentaires, animés, films jeunesse très variée et en constante augmentation (plus de 10 000 films à ce jour). Travail d’éditorialisation (sélections) et intégration d’une offre de niche (sélections par des réalisateurs dans la Cinétek).
  • L’accessibilité de l’interface de la plateforme est évaluée à 40% mais il faut noter qu’un travail important est fait pour rendre les contenus accessibles (possibilité de ralentir la lecture du film, police dys pour les sous-titres, 1700 programmes avec sous-titres sourds et malentendants, 250 programmes avec audiodescription).
  • Volonté de promouvoir la sobriété numérique également : possibilité de télécharger les films.
  • Fonctionnement : système de forfait de visionnage avec plafond d’inscrits au service et tarification à l’acte (système de jetons). C’est un modèle tarifaire difficile à gérer pour les bibliothèques : plus ça marche, plus on paye… on peut se retrouver à devoir arrêter l’abonnement. Pour réguler, possibilité de mettre un quota par usager et par période. Possibilité aussi de mettre un filtre (enlever les nouveautés car elles consomment plus de jetons), mais personne ne le fait.


CVS :

  • Tarification à l’acte également.
  • Plateforme avec authentification en SSO.
  • Pas encore dans le catalogue Carel. Les négociations sont en cours pour le référencement. L’objectif pour Carel est d’arriver à une offre claire et transparente à proposer aux bibliothèques.


Adavision (Médialib) :

  • Pour cette ressource on n’est pas sur une offre de bouquet mais les bibliothèques ont la possibilité de se constituer leur propre collection de films en les achetant un à un → achat au titre.
  • Permet aussi la diffusion de contenu créé localement (ex : bibliothèque de Grenoble).
  • Malheureusement, cette offre créée à la demande des bibliothèques ne rencontre pas le succès escompté et se trouve contrainte à des évolutions techniques.

Filmfriend :

  • Filmfriend est une nouvelle offre de cinéma en bibliothèque. Il s’agit à l'origine d’une plateforme pour les bibliothèques allemandes qui commence à se développer à l'international.
  • Propose actuellement 1000 titres environ (⅓ fiction, ⅓ documentaire, ⅓ jeunesse) pour l’offre française mais le catalogue est en cours de développement.
  • Plateforme qui négocie les droits de projection pour les bibliothèques, qui ont quand même à payer les droits (environ 50 € pour 50 personnes) pour organiser la projection. Ont pu les obtenir pour 85 % du catalogue.
  • Tarification : forfait en fonction du nombre d’inscrits à la bibliothèque et du pourcentage d’utilisateurs. Pas de système de jetons ou quotas pour les visionnages, une fois connecté l’usager a accès à tout le catalogue sans limite de visionnage.
  • Espace administrateur avec statistiques en temps réel.


Les yeux doc :

  • 400 films du catalogue national des films documentaires, la sélection étant faite par des bibliothécaires. On y retrouve des films documentaires et des films documentaires animés.
  • Ligne éditoriale : un contenu encyclopédique, mais avec un regard d’auteur.
  • Curation et animation de la plateforme par la BPI, avec le soutien et la participation de Images en bibliothèques. Les films sont achetés pour 10 ans (au-delà, ils disparaissent de la plateforme). N’est pas assujetti aux marchés publics.
  • Tarification forfaitaire avec accès illimité au catalogue et droits de projection négociés. La distribution est confiée à la Médiathèque numérique Arte (qui gère le connecteur). La tarification va évoluer, notamment pour les BDP (hausse à prévoir).


DocsTV :

  • Offre grand public de plus de 1500 documentaires, distribuée par HDP Interactive.
  • Tarification forfaitaire sans limite de visionnage.
  • N’a pas les droits de projection.


Opsis :

  • Catalogue de spectacles vivants filmés (plus de 500), distribué par HDP Interactive mais hébergé par 1D Lab.
  • Pas de système de quota pour le visionnage (streaming), accès à tout le catalogue.
  • Forfait calculé en fonction du nombre d’utilisateurs.
  • A les droits de projection.
  • L’interface a été complètement refaite et contient notamment une rubrique “collège”.

À noter : Tënk (proposé aussi par 1D Lab) ne souhaitait pas être référencé par CAREL.


Des discussions sont actuellement en cours entre Carel et :

  • le CNC
  • Cortex : Plateforme de VOD sur la santé, le handicap et l’autonomie avec des films et documentaires sous-titrés ou en version sourds et malentendants, audiodescription et contenus en FALC. Ont les droits de projection et les droits pédagogiques de tous leurs contenus.
    Personnes ressources disponibles pour intervenir sur une formation ou une animation (traductrice en FALC, comédienne formée au facile à entendre et à comprendre, réalisateur de films sur le handicap…). Un bémol : l’interface elle-même ne répond pas aux normes d’accessibilité (prestataire étranger qui n’a pas les mêmes normes). Tarifs : 1000 € de frais de mise en place la 1ère année + forfait calculé sur la base de 1 à 2 € par abonné (estimation du nombre d’abonnés actifs : 4 à 5 % des inscrits). Si le nombre de comptes est dépassé, l’accès n’est pas bloqué, on réajuste l’abonnement l’année suivante.
    À venir : adaptations de La Parure, La Vénus d’Ille, livres scolaires qui vont être mis en audioFALC, oeuvres du musée des Beaux-Arts…)
  • Le cinéma à 360 (Lucid Realities et ADAV)

Question posée dans l’assemblée : "Quid de l’offre pour le public jeunesse ?"

Réponse : Réseau Carel est preneur de suggestions et recense les besoins des bibliothèques pour entamer des discussions avec d’éventuels prestataires. Un contact avait été pris avec une plateforme, mais elle n’avait pas les droits de diffusion auprès des bibliothèques.
Il y a du contenu jeunesse au sein des plateformes de VOD généralistes (Médiathèque numérique, Filmfriend…) ou du contenu filmique au sein de ressources jeunesse (plateforme “Ma petite médiathèque” d’Arte).

 

Réflexions de Franck Queyraud, vice-président de Réseau Carel :

Réseau Carel est actuellement dans la démarche de créer des groupes de travail ponctuels autour de thématiques qui ne nécessitent pas de travailler dessus sur du long cours. Les bibliothécaires sont invités à y participer.
C’est le cas pour le groupe de travail autour de la VOD cette année : ce “club utilisateurs” a réfléchi aux modèles d’acquisition, à la place des bibliothécaires et à la médiation autour des ressources VOD.

La situation est compliquée : quand une offre marche, on ne maîtrise pas les coûts, et celles dont on maîtrise les coûts sont celles qui ne marchent pas ! 

Avec les plateformes en streaming, les bibliothécaires ont aussi perdu la main sur la notion de constitution des collections (ce qui est l’ADN des bibliothécaires) car on achète des bouquets. Il y a pourtant là un enjeu de politique publique : préserver la diversité de l’offre.
Peut-on faire autrement ? Nous pensons les ressources numériques selon une logique de “service ajouté” aux portails des bibliothèques au lieu d’avoir une logique de “collection”. Nous devrions nous positionner comme des acteurs qui constituent un vrai catalogue.

On examine la diversité mais avons-nous le choix de dire “non” à certains contenus quand nous faisons un appel d’offre ?

Ces bouquets proposent des milliers de titres de films, musique, de cours en ligne, etc. alors que les gens n’en voient/écoutent qu’une infime partie (dans ma bibliothèque, 7% de l’offre VOD est vue par les usagers). Nous payons donc très cher pour des contenus qui ne seront jamais visionnés/utilisés. Est-ce que cela a un sens ? Comment apporter une plus-value ? Avons-nous le temps de faire de la médiation ?
Il ne faut pas non plus oublier que certains contenus existent seulement en DVD et pas au format numérique. De même, il y a moins de films accessibles avec des sous-titrages pour sourds et malentendants ou de l’audiodescription au format numérique.

Peut-on continuer à “donner accès” quand on n’est plus maître de ses choix ?

Enjeux et tensions autour des offres de VOD en bibliothèque

Intervention de Cédric Ferrut (chef du Service Logistique et Numérique, Médiathèque départementale de l’Ardèche), Caroline Monnot-Chavet (responsable Service Acquisitions-Abonnements, Bibliothèque municipale de Lyon), Gauvain Sansepee (médiateur cinéma, Médiathèque Landowski de Boulogne-Billancourt), Frédéric Zatka (directeur du Groupement d’intérêt public Limédia, Sillon Lorrain), Vincent Bullich (professeur en sciences de l’information et de la communication, Université Lumière Lyon 2). 

Intervention animée par Marie Cambone (maîtresse de conférences en sciences de l’information et de la communication, Université Grenoble-Alpes).

 

Tensions entre spécificités locales et besoins pour les bibliothèques de se fédérer pour exister :

Vincent Bullich : À côté des géants de la VOD, il y a les “artisans” : une centaine de plateformes qui se partagent les miettes. Leur financement : participer à des offres agrégées auxquelles s’abonnent les bibliothèques.

Cédric Ferrut : Les BDP ont des publics larges : les salariés et bénévoles des bibliothèques, et indirectement les usagers des structures qu’elles desservent.
Comment compléter les fonds des bibliothèques ? Les BDP ont actuellement des budgets qui explosent pour le numérique, notamment à cause de la VOD, qui représente à elle seule 40 à 60 % du budget numérique. C’est l’offre VOD qui est motrice (elle attire les usagers), mais avec la tarification à l’acte, soit elle fait exploser les budgets, soit le service s’interrompt en cours d’année faute d’avoir pu racheter des jetons. Quant à mettre des quotas : c’est dommage de limiter l’accès lorsqu’il y a de la demande. En VOD documentaire, c’est plus simple : il y a pas mal d’offres forfaitaires. Pour le reste, on perd la maîtrise des collections et des budgets.

L’offre numérique des BDP est en lien direct avec les usagers alors que les bibliothécaires BDP sont en contact direct avec les bibliothécaires : il est donc difficile d’avoir des retours directs des usagers.
Quel rôle peuvent jouer les BDP ? Dans l’étude des réponses aux appels d’offre, s’intéresser aux prestations numériques qui permettent aux bibliothécaires de terrain de faire de la médiation.
Pour exemple, une BDP a fait le calcul pour comparer le coût d’un film à succès. Alors que le DVD avec les droits négociés lui a coûté 50 €, le même film au format VOD lui a coûté 1400 € en tenant compte du nombre de visionnages. De tels coûts sont difficiles à défendre devant les élus.

Frédéric Zatka : Cependant, il ne faut pas oublier que les ressources numériques sont accessibles 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 et qu’il n’y a pas de liste d’attente… Avec les questions de déblocages, bugs, maintenance que ça implique pour les bibliothécaires en charge de ces ressources.
D’où l’intérêt de se fédérer. Limédia propose un portail avec plusieurs ressources et une seule identification pour les usagers du Sillon lorrain (qui comprend des villes plus petites, des bibliothèques communales…). Limédia est un groupement d’intérêt public qui s’occupe de la “tuyauterie” au service du réseau des bibliothèques. Résilience du réseau qui permet d’assurer la cohérence quand il y a des départs ou arrivées dans les équipes, même si c’est un peu plus lourd à faire fonctionner. 1,5 ETP dédié au groupement (pour 700 000 habitants), en plus du personnel des bibliothèques.

La plateforme est personnalisable et éditorialisable (carrousels, sélections). Il faut une actualité régulière pour l’alimenter : c’est plus facile si on est un réseau.

Mais même en se fédérant, une bibliothèque n’arrivera pas à imposer son modèle économique à une plateforme. Et on a très peu de marge sur les tarifs. On est aussi trop petits pour peser sur le prix de tout ce qu’il y a “à côté” (connecteurs SSO, etc.). Si on veut renégocier quelque chose, il faut refaire un marché.

Cédric Ferrut : En Ardèche, nous avons 60 000 € de budget ressources numériques (pour un réseau qui n’inclut pas les grandes villes). Nous avons Les Yeux Doc, Tënk et la Philarmonie.

Gauvain Sansepee : Boulogne-Billancourt fonctionne sur un budget municipal. C’est un territoire dense avec 5 bibliothèques et 1 centre e-sport. Le budget est confortable : 247 000 € de budget de fonctionnement, dont 125 000 € d’abonnements (papier inclus). Nous avons la Médiathèque numérique Arte, Tënk, Les Yeux Doc. Mais même quand on a de l’argent, le modèle tarifaire avec jetons pose problème.

Un exemple d’éditorialisation des contenus : pour s’approprier un peu plus la notion de collection réfléchie, la bibliothèque de Boulogne-Billancourt a créé le site Cinéma libre en ligne. L’idée de proposer des films en “accès libre” est née suite à une journée organisée par Images en bibliothèques et a pu se concrétiser pendant le confinement de 2020.
Il existe peu de films libres de droits en ligne : il y a ceux du domaine public, et les licences libres. Mais encore faut-il les trouver. Le bibliothécaire effectue ce travail de repérage et rapproche les films issus de différentes sources au sein de sélections thématiques, pour tous les publics.
Ce projet fédérateur rassemble désormais des référents et des contributeurs à l’échelon départemental via les associations professionnelles du 92 et du 93. Ça permet d’officialiser sans être trop rattaché à une collectivité particulière (Boulogne-Billancourt).

 

Tension entre coût et accessibilité :

Caroline Monnot-Chavet : Nous avons un budget ressources numériques de 80 000 € pour 4 000 usagers des ressources numériques (sur 72 000 abonnés actifs). Nous sommes abonnés à la Médiathèque numérique Arte. Le quota est une bonne chose pour limiter les consommations. Nous avons même acheté trop de jetons, alors on fait une offre pour Noël : 8 jetons au lieu de 5. Travail de mise en valeur, etc.

Vincent Bullich : 35 % des coûts sont donnés aux diffuseurs. Un acteur dominant reste la télévision. Les éditeurs préfèrent vendre les droits à la télévision plutôt qu’aux plateformes numériques.
Le prix se décompose de la façon suivante :

  • 30 à 35 % pour l’éditeur
  • 15 % pour le distributeur
  • 35 % pour la plateforme
  • auxquels s’ajoutent les impôts (TVA, taxe sur la vente et la location de vidéogrammes, taxe type SACEM…)

Il y a donc concurrence entre les plateformes. Les éditeurs refusent le plus souvent les clauses d’exclusivité que voudraient les distributeurs.
Selon un calcul du CNC, la VOD à l’acte coûte 3,90 € par visionnage.

Frédéric Zatka : Les bibliothèques n’ont pas de modèle économique, ou plutôt il est celui d’Amazon et Apple : renforcer l’attractivité de la structure, en l’occurrence les bibliothèques. La VOD renforce l’attractivité du reste des services proposés par la bibliothèque (elle augmente par exemple le nombre de visites sur le portail).

Gauvain Sansepee : Nous avons 1300 inscrits actifs aux ressources numériques, dont 400 utilisateurs mensuels. Nous avons acheté 21 000 crédits de visionnage sur une année, pour 24 000 € par an. Nous n’avons pas de portail ni de recherche fédérée, mais ça va bientôt changer heureusement.

Frédéric Zatka : Le modèle de services est aussi à définir : quelle sélection et éditorialisation veut-on pouvoir faire ?
Il ne faut pas non plus oublier les aspects techniques, souvent méconnus. Ainsi l’augmentation de la taille des écrans amène le passage à des vidéos de plus grande résolution (1080 pi), ce qui signifie des coûts plus importants pour les éditeurs, qui vont forcément se répercuter sur les bibliothèques.
Dans l’idéal, il faudrait pouvoir mixer entre une offre de base (bouquet) et un supplément (choix titre à titre).

Caroline Monnot-Chavet : On a fait des calculs sur le rapport budget / fréquentation du portail : 32 centimes par connexion, et 1,70 € de coût mensuel par visiteur unique.

 

Éditorialisation et médiatisation des contenus :

Cédric Ferrut : Difficulté de la médiation souvent par manque de compétences (bibliothécaires bénévoles ou professionnels ne maîtrisant pas eux-mêmes les usages). En BDP, la médiation autour de la VOD est difficile. Surtout quand on dessert des territoires avec des zones blanches où le visionnage en streaming est quasi-impossible. Pouvoir télécharger plutôt que streamer est donc “vital”.
La BDP de l’Ardèche accentue donc ses actions autour de la médiation et du soutien aux actions culturelles. Elle participe au festival Les Sentiers du Doc en novembre pour valoriser la plateforme Les Yeux doc, elle prévoit aussi de former les bibliothécaires ardéchois pour participer à la prochaine édition du festival. C’est un travail chronophage mais riche.

Gauvain Sansepee : On a réalisé des jaquettes fantômes pour les films qu’on n’a pas en DVD mais qui sont en VOD. Il est toutefois difficile de mesurer le succès de l’opération. On le faisait avec de vrais boîtiers au début, mais ça génère de la frustration et ça ne touche pas le bon public.
On fait des sélections personnalisées sur la plateforme Médiathèque numérique Arte, et on matérialise les sélections avec des QR-codes lors des animations. On les met aussi, par exemple, dans le DVD d’un autre film du même réalisateur.
De même, grâce à la plateforme Les Yeux docs qui négocie les droits de projection, organiser des projections a permis un vrai travail de médiation auprès des publics et une nette augmentation de la consultation des ressources numériques dans les jours et semaines qui ont suivi. Même s’il est nécessaire d’entretenir cette dynamique car l’effet positif retombe tout aussi vite. 

On a une newsletter, et on anime le site Cinéma libre en ligne dont nous avons déjà parlé (merci à Images en Bibliothèques pour le premier recensement des ressources sur lequel nous nous sommes appuyés). Le travail d’éditorialisation consiste à rapprocher les films issus de plateformes différentes. L’avantage de le faire sur un site qui nous est propre, c’est qu’on peut rédiger ce qu’on veut sur ces contenus et mettre en avant des événements en médiathèque. Chacun peut mettre ce site sur son portail, même s’il n’y contribue pas.

Caroline Monnot-Chavet : On s’appuie sur les statistiques de consultation des films. On fait des jaquettes fantômes pour les DVD sur-réservés, en disant “il n’est pas en rayon, mais vous pouvez le voir en ligne”. Le taux de pénétration de la VOD reste faible, mais il faut dire qu’on n’a pas fait de communication institutionnelle dessus.

Vincent Bullich : Le “désir” du programmateur est très présent chez le public, en particulier chez les cinéphiles et pour les enfants. On retrouve là l’héritage de pratiques plus anciennes : volonté du public qu’il y ait une programmation, comme au temps du ciné-club ou de la cinémathèque.

Frédéric Zatka : Il faut aussi penser à d’autres formes et lieux de médiations : les hotspots* par exemple, dans le hall de la bibliothèque. (*hotspot = endroit physique où les utilisateurs peuvent connecter sans fil leurs appareils mobiles)
Il faut maîtriser sa plateforme et son code pour pouvoir faire cela. Or Limédia est une plateforme open source (on peut la prêter, la donner…).

 

  • Question : "Quel est le pourcentage du numérique par rapport au physique dans les collections ?"

Cédric Ferrut : On fonctionne avec un budget constant. On décale des choses sur l’action culturelle par exemple quand on a besoin. Mais le budget numérique est resté stable. On essaie aussi de trouver d’autres financements : par exemple le Label BNR pour financer d’autres projets numériques.

Caroline Monnot-Chavet : On a un budget confortable, donc pas de choix à faire entre DVD et VOD. On a pris moins de ressources d’autoformation : désormais nous n’en avons plus qu’une seule.

Gauvain Sansepee : Les DVD sont en dépenses d’investissement, la VOD en dépenses de fonctionnement.

 

  • Remarque de la plateforme Tënk :

Les écoles d’art et les universités constituent la majorité des abonnés à notre plateforme. Elle a du mal à prendre en bibliothèque. (On propose 60 films, renouvelés 7 par 7.) La cinéphilie ne se transmet pas par l’outil technique, la médiation est effectivement essentielle, mais elle est rarement abordée dans les contacts que nous avons avec les bibliothèques (on nous demande les statistiques d’utilisation, rien d’autre). Il y a aussi des freins au sein même des plateformes : pour certains, les bibliothèques sont vues comme un concurrent à l’abonné individuel, cible la plus recherchée.

 

  • Question : "Comment faire pour que la médiation ne repose pas que sur le responsable numérique ?"

Gauvain Sansepee : C’est effectivement très prenant. 2 personnes s’y consacrent.

Caroline Monnot-Chavet : Cela représente une journée par semaine pour une personne.

Frédéric Zatka : Au sein de Limédia, le groupe technique Mosaïque se réunit régulièrement. C’est un groupe tournant, on peut y contribuer en faisant des paniers…

 

  • Remarque d’Harriett Seegmuller (Arte) :

C’est plutôt 50 à 80 % de notre chiffre d’affaires qui est reversé aux ayants-droits. Et pour les nouveautés où nous avons un minimum transactionnel, cela peut aller jusqu’à 100 % du prix ! Il nous est difficile d’être financièrement autonomes, d’où les subventions du CNC.

Rencontre avec les institutionnels

Intervention de Pascale Issartel, adjointe au chef du département des bibliothèques, ministère de la Culture, Service du Livre et de la Lecture (à noter : elle a commencé sa carrière en bibliothèque départementale et a dirigé le département audiovisuel de la BNF), et Léa Luret, cheffe du service des publics, Direction des politiques territoriales, Centre National du Cinéma et de l’image animée.

Intervention animée par Jean-Yves de Lépinay (Président d’Images en bibliothèques) et Franck Queyraud (Vice-Président de Réseau Carel).

 

  • "Pourquoi faut-il avoir des offres de VOD en bibliothèque ?"

    Pascale Issartel : La dématérialisation des collections est incontournable dans notre métier. On y est confronté dans tous les secteurs (on voit même des disparitions d’espaces musique et cinéma dans certaines bibliothèques). Actuellement, les offres numériques ne sont pas adaptées aux bibliothèques, il y a des restrictions budgétaires etc… Comment faire avec tous ces éléments ? Il faut plutôt penser les ressources numériques comme une source de richesse qui va dans le sens de la diversité culturelle en médiathèque (il y a des contenus très riches, qui ne peuvent pas ne pas être en bibliothèque).

    Jean-Yves de Lépinay :  D’autant qu’il y a des inégalités territoriales fortes.

    Léa Luret : Les bibliothèques ont une action en direct dans les zones où il n’y a pas d’autre établissement culturel, parfois. Le CNC s’engage dans l’éducation artistique et culturelle auprès des plus jeunes, afin de développer la cinéphilie, l’objectif étant de faire venir le public en salle. Pour cultiver ce lien entre les bibliothèques et les salles de cinéma, le CNC organise le festival des Mycéliades et le Mois du film documentaire.

 

  • "Quelle aide pouvez-vous apporter aux bibliothèques ?"

    Pascale Issartel : Le “bras armé” du ministère de la Culture, c’est la BPI et tout ce qu’elle a mis en place, dont Les Yeux Doc. Mais il y a une difficulté par rapport à l’offre : certains films de nos fonds DVD ne sont pas sur les plateformes. Comment les rendre accessibles en numérique ? Il faut une réflexion partagée pour mettre tous les problèmes sur la table.

    Léa Luret : le CNC accompagne les bibliothèques en gérant le catalogue “Images de la culture” pensé spécifiquement pour les bibliothécaires (comité de sélection en partenariat avec Images en bibliothèques). Il ne contient pas que du documentaire, l’offre est enrichie par le fonds “images de la diversité” et va être rattachée à la cinémathèque du documentaire.
    Le CNC soutient aussi Images en bibliothèques (et vice-versa).
    “Images de la culture” est en cours de référencement auprès de Carel. Cette offre donne accès à un catalogue tournant (comme Tënk) dans lequel les bibliothécaires peuvent sélectionner 10 films/mois.

    Jean-Yves de Lépinay : L’idée est de reprendre la main sur le choix et la médiation : les droits de projection étant tous acquis, les bibliothèques peuvent organiser des animations. Il faut faire un choix et mener une action avec.
    Même s’il reste du travail, de façon générale l’accès aux contenus est beaucoup plus facile qu’avant, pour les jeunes notamment.

 

  • "Et la formation pour les bibliothécaires ? Images en bibliothèques propose des formations mais ce n’est pas forcément abordable pour toutes et tous, est-ce que les CNFPT pourraient proposer des formations faites par Images en bibliothèques ?"

    Jean-Yves de Lépinay : Images en bibliothèques propose actuellement une cinquantaine de formations autour du cinéma (dont la plupart ont lieu à la BPI) et ne peut pas en proposer plus pour l’instant (nombreux thèmes : comment organiser un débat, comment organiser une séance, etc.). Il y a notamment des formations autour de la VOD (y compris techniques) dans leur catalogue. Envisager de les faire via le CNFPT n’est pas possible, mais les BDP peuvent prendre contact avec Images en bibliothèques pour en organiser à destination de leur réseau.
    Les médiathèques ont aussi des atouts pour développer des partenariats locaux (L’écran mobile…), car la médiathèque est l’endroit le plus partagé.

    Pascale Issartel : Il y a 15500 médiathèques et points lecture en France, ainsi qu’un réseau dense de cinémas. Des moyens ont été affectés au “plan pour les bibliothèques”, dont les objectifs sont : ouvrir plus, offrir plus et former mieux. Une journée sur les métiers en transition aura lieu le 12 mars 2024 à la BPI (elle sera captée et disponible en ligne). Il y a aussi le programme spécifique des BNR (Bibliothèques Numériques de Référence).
    Les bibliothèques sont un formidable réseau de diffusion  pour les contenus émergents et les ressources libres, il y a des pistes à creuser du côté de l’immersif et du jeu vidéo (avec les “machinima” notamment) en direction du public ado qui “décroche” à 15 ans.

 

  • "Coopération et rôle des associations professionnelles ?"

    Pascale Issartel : Ziklibrenbib s’arrête après 10 ans, malgré l’investissement des bibliothécaires. Les associations professionnelles comme réseau CAREL (négociations et groupes de travail comme le “club utilisateurs VOD” qui a préparé cette journée), jouent un rôle très important.

    Franck Queyraud : De belles initiatives, comme les 3 “boîtes” Limédia https://limedia.fr/ (Limédia Mosaïque, Limédia Galeries, Limédia Kiosque), qui sont open source et donc réutilisables par d’autres.

 

  • "La campagne de communication sur les bibliothèques lancée par le Ministère de la Culture en 2023 a démarré beaucoup trop tard et est passée quasiment inaperçue. Y en aura-t-il une en 2024 ?"

    Pascale Issartel : Effectivement il y a eu quelques difficultés avec la campagne de cette année, mais une campagne de communication aura bien lieu en 2024 et sera organisée différemment. On essaie d’adapter la stratégie aux territoires : il n’y a pas que la problématique des territoires ruraux, il y a aussi la question des villes moyennes.

 

  • "N’y a-t-il pas un travail à faire avec le pass culture ? Il y a des crédits qui ne sont pas utilisés."

    Pascale Issartel : Dans le pass culture, il y a la part individuelle et la part collective. L’idée est d’aller là où sont les publics et de partir de leurs usages. On travaille à ce que les bibliothèques s’inscrivent sur le pass culture et fassent connaître leur programmation (c’est aussi à ça que sert le pass, il n’est pas que pour ce qui est payant). La part collective est à l’initiative des enseignants.

    Franck Queyraud : la majorité des offres culturelles en VOD ne sont pas prises en charge par le pass culture.

End FAQ

Pour toute question complémentaire, contacter France Dufay : fCette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. ou Roxane Burquier : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.